La Chine cale dit la presse, qui se demande quelles en seront les conséquences sur nous. Les explications sont simples : nous changeons d’époque, et le changement radical de nos modes de fonctionnement viendra dans la douceur bien organisée mais déterminée, ou dans la brutalité d’une guerre intérieure et extérieure… A choisir !
La Chine cale. Ce fait, désormais avéré, était inclus dans notre livre « Les clés du renouveau grâce à la crise » publié en 2012, à l’annexe A3 « La Chine va caler ». Depuis, la règle d’or a été « continuons tant que nous pouvons ! ». Mais aujourd’hui, la géopolitique dit clairement que ce n’est plus possible, les chaînes d’approvisionnement mondialisées sont bousculées, les marchés porteurs d’hier des pays en développement se tarissent. Même le luxe est touché en Chine !
L’explication de la situation d’aujourd’hui est claire :
- Le monde est en récession réelle, malgré les statistiques cosmétisées, parce que la réduction de la durée de vie des produits entraîne un surcroît de chiffre d’affaires artificiel et une réduction du niveau de vie bien réelle.
- Il l’est virtuellement depuis la crise financière de 2007-2008 qui n’a jamais été traitée autrement que par des artifices financiers, aux frais des États qui sont désormais si endettés qu’ils sont un boulet pour les économies de leurs pays et non un ressort dynamique, entraînant une réduction du pouvoir d’achat. Si la consommation n’a jamais été, contrairement à ce qu’on peut entendre et lire régulièrement, le moteur de l’économie, elle en est, néanmoins, indispensable.
- A cela s’ajoute quatre spécificités chinoises :
- Les plans de relance ont conduit à des productions totalement artificielles, comme les villes fantômes ou les autoroutes sur lesquelles personne ne roule. Ces investissements ne seront jamais amortis et sont un boulet qui ralentit l’économie, car ils ont été financés par de la dette !
- Les surcapacités de production sont désormais évidentes, poussant la Chine à exporter à prix cassés, ce qui ne peut que stimuler les tensions, pousser au protectionnisme car les bas prix chinois sont injustifiés compte tenu des coûts.
- La montée excessive des prix de l’immobilier donnait aux Chinois un sentiment de richesse qui les incitait à consommer. La réalité ayant éclaté, la sagesse chinoise conduit à la réduction de la consommation, afin d’épurer les dettes. Cet acte est sain, mais ceux qui veulent toujours vendre plus ne peuvent pas le comprendre. Cela touche aussi le sacro-saint pacte social entre le gouvernement chinois et le peuple : privation des libertés contre développement économique. La stabilité politiques est à ce prix, et son non-respect pourrait, comme cela s’est vu de nombreuses fois dans le passé, conduire à la guerre pour maintenir l’unité nationale.
- Les Etats-Unis ne supportant pas d’avoir un concurrent sérieux, et la Chine refusant d’être, pour toujours, « l’atelier du monde » avec des salaires de misère, le conflit devenait inévitable ; les sanctions ont donc été pensées et appliquées, ce qui alourdit encore les charges.
La politique de Trump contre la Chine, en excluant la guerre et en agissant uniquement sur l’économie, a tellement bien fonctionné que l’administration Biden l’a reprise et la Commission européenne a suivi.
- « Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel » est un célèbre adage boursier. Pourtant, les financiers veulent toujours plus, n’acceptent pas de périodes d’apurement, d’assainissement de l’économie. John Kennedy disait, en substance « Si vous refusez les réformes, vous aurez une révolution ! ». Nous pourrions le paraphraser en disant « Si vous refusez les périodes d’assainissement de l’économie, vous aurez une récession plus brutale et plus longue ! »
- La dette mondial est égale au PIB mondial, avec 100.000 milliards de dollars, selon le rapport 2024 de l’OCDE ! Tout le monde est d’accord pour dire que c’est insensé, qu’elle ne sera jamais remboursée si cela continue ainsi, mais réduire la dette suppose une contraction de l’économie. Les marchés, les actionnaires, sont-ils prêts à revenir aux réalités : de temps en temps, il faut un temps de correction pour assainir la situation. C’est ainsi que l’on peut repartir sur un temps de vraie croissance. La preuve : depuis combien de temps n’avons-nous pas eu de vraie croissance, comme au 19ème siècle, comme au 20ème siècle, avant la mondialisation, c’est-à-dire avant une vision strictement financière et court-termiste que nous subissons toujours. On nous annonce une croissance de 3% aux Etats-Unis avec des bravos, mais que valent 3% de croissance quand la réalité de l’augmentation des prix est très supérieure, quand on sait qu’il faut 3 dollars de dettes pour créer un dollar de PIB supplémentaire ?
- A propos de dettes, de pouvoir d’achat, de hausse des prix, de multiples informations qui brouillent les esprits plutôt que de les éclaircir, un simple jeu d’informations est à retenir :
- Entre 2019 et 2024, les banques centrales ont doublé la masse monétaire. Qu’a fait l’or pendant ce temps ? son prix a doublé ! L’or ne monte ni ne descend, il est stable, et c’est la monnaie qui se réévalue ou qui se dévalue, cette dernière option correspondant à 99% des cas… L’inflation de la masse monétaire, dont la conséquence est une monté des prix, est un impôt qui ne dit pas son nom !
- Selon l’OCDE, 2024 verra une augmentation du ratio Dettes/PIB ! Nos dirigeants craignent les conséquences d’une décision saine, ne font rien en conséquence, tout en sachant que nous nous rapprochons chaque jour du précipice. Ils savent aussi que les classes modestes sont frappées de plein fouet par la hausse des prix alors que les revenus très supérieurs, investis dans les placements financiers, arrivent à compenser, voire à en sortir très gagnants. Chaque jour qui passe est un jour gagné, mais tout le monde sait que le risque de krach boursier est élevé. Que se passera-t-il si les classes favorisées en sont terriblement meurtries ?
- Le dollar n’est plus LA monnaie de référence. La dédollarisation du monde a fait son chemin, année après année, pour échapper à l’extraterritorialité du droit américain, privilège exorbitant d’une hyper puissance qui ne l’est plus.
- La hausse des prix, que tout le monde constate, ne va pas diminuer puisque l’augmentation annoncée du fret maritime va immanquablement se répercuter sur les prix de détails, puisque les prix de l’énergie ne peuvent pas baisser sur le long terme, étant un enjeu de pouvoir déterminant dans l’affrontement en cours. Le niveau des défaillances d’entreprises, en France, est très élevé ; la récession américaine n’est contestée que par ceux qui ne veulent pas la voir.
- Une étude récente[1] a montré que l’or surperformait déjà de grands noms comme Verizon, Target, McDonald’s. Cela montre que ces entreprises sont entrées dans une zone de turbulence, faute d’environnement géopolitique stable, d’environnement macroéconomique favorable, d’entreprises prêtes à, capables et désireuses d’investir (Apple a établi un nouveau record, en mai dernier, avec un plan de rachat d’actions de 110 milliards de dollars, du pur mécano boursier, sans le moindre effet sur l’économie réelle).
Sur le fond, la question à laquelle nous devons répondre est : « après un cycle de 30 ans allongé artificiellement à 40 ans, pendant lequel les fondamentaux de l’économie réelle ont été rejetés, méprisés, pour favoriser la maximisation du profit à court terme, il n’y aura pas de convalescence à cette surconsommation de drogue tant qu’on ne reviendra pas aux réalités de l’économie réelle ; allons-nous choisir une nouvelle surdose ou une cure de désintoxication ? »
La réalité est que, même ceux qui ont le plus profité de cette période ont intérêt à ce qu’elle cesse, parce qu’il vaut mieux éviter que le boomerang revienne avec beaucoup de force ! Si ce choix n’est pas fait, attendez-vous, d’ici moins d’un an, au pire !
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[1] L’or en passe de surperformer les grandes marques https://or.fr/actualites/or-en-passe-surperformer-grandes-marques-consommation-3391