La révolution des transports et la révolution des technologies de la communication ont rétréci le monde. Il aurait pu (dû ?) apparaître en conséquence une imbrication durable des économies mondiales, faisant bénéficier chacun des atouts des autres.
Mais ceux qui ont été les plus déterminants dans les choix faits ont donné la priorité à la maximisation des profits à court terme. Cela supposait le développement de l’économie de l’obsolescence, où les produits sont conçus pour ne pas durer, « forçant les consommateurs à renouveler leurs achats avant l’usure réelle des produits » comme Bernard London, a conceptualisé cette forme d’économie en 1932, dans une brochure à en-tête de l’Université du Minnesota.
Cette économie de l’obsolescence conduit à une surconsommation de ressources, donc à des surcoûts, compensés par une réduction des salaires. C’est pourquoi Christian Blanc, ancien président d’Air France et ancien ministre, a écrit dans une préface[1] « l’économie de l’obsolescence est basée sur une main-d’œuvre à bas prix et qui doit le rester ».
A ce défaut majeur s’est ajouté la conséquence de la rupture du lien entre le dollar et l’or en 1971. Avant cette date, l’étalon-or, modifié à la baisse par les accords de Bretton Woods, obligeait à des mécanismes régulateurs interdisant les excès d’excédents et de déficits. Après cette date, il n’y avait plus aucune limite aux déséquilibres.
Le transfert de richesse des pays occidentaux aux pays émergents aurait dû apparaître et provoquer des corrections, mais ce transfert a été caché par un endettement qui, lui non plus, n’a pas connu de limite.
Aujourd’hui, le niveau atteint oblige à une correction, comme le changement d’image de la Chine, gentil atelier du monde à bas prix devenu un méchant pays à volonté impérialiste. Il est donc en train d’être acté une correction qui ne peut qu’être sévère, et l’inflation naissante, déjà plus forte que décrite dans les discours, va en être l’instrument majeur. Une inflation réelle de 5% par an pendant 15 ans permettra d’effacer 75% de la dette. A cela s’ajoutera le transfert du salariat vers le statut d’indépendant, marqué par la précarité et le transfert des charges.
Ne pouvons-nous que subir ? Non ! Il n’est pas un hasard que le Forum économique mondial, le FMI, l’ONU[2], promeuvent hautement l’économie circulaire et une démondialisation contrôlée (Covid 19 : the great reset, Klaus Schwab[3] & Thierry Malleret, WEF éditions, 2020). Dans ce livre, les auteurs indiquent que « la mondialisation sera touchée dans son cœur nucléaire, les chaînes d’approvisionnement mondialisées » et indiquent que les boucles courtes et les circuits courts seront les clés d’une empreinte écologique réduite, d’une pollution en régression et du retour d’un pouvoir d’achat stabilisé.
L’économie circulaire vise, par différents moyens, à réduire substantiellement la consommation de ressources matérielles pour créer une unité de valeur ajoutée car il n’y a aucune proportionnalité entre la richesse créée et la consommation de ressources matérielles.
Pour dire les choses simplement, moins nous consommons de ressources matérielles, plus il y a de place pour les salaires, et donc, plus nous amortirons le choc social qui a commencé et, heureusement et malheureusement, ne fait que commencer. Heureusement, car si nous optons pour l’économie circulaire, nous aurons un levier pour le limiter.
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Il n’est pas un hasard non plus que l’Union européenne soutiennent des programmes de recherche visant à réduire sa dépendance aux matières premières, surtout stratégiques. La pénurie de micro-processeurs a réduit la production de Stellantis (ex-PSA) de 190.000 véhicules sur le premier trimestre de 2021. Dans les projets de recherche soumis en 2021, dont le signataire de cet article est évaluateur, l’économie circulaire doit être prise en compte ; à la recherche scientifique doit être associée le réemploi, la remise à neuf, le recyclage matière, les boucles courtes et les circuits courts.
Nous vivons un moment très difficile, mais nous avons l’intelligence pour nous adapter au nouveau cycle de 30 ans dans lequel nous sommes entrés.
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[1] Les clés du renouveau grâce à la crise, Eric Fromant, ems-éditions, 2012.
[2] « Il est clair qu’il y a un déficit de confiance grandissant entre les gens et les pouvoirs politiques, autant de menaces qui pèsent sur le contrat social. Le monde se débat aussi avec les impacts négatifs de la mondialisation et des nouvelles technologies, qui ont augmenté les inégalités au sein des sociétés. Avant tout, j’en appelle à tous les dirigeants à écouter les vrais problèmes des vraies gens. » Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, 25/10/2019
[3] Président fondateur du Forum économique mondial.